Si l’« apocalypse » prédite par certains (guerre ouverte entre enseignants et animateurs, équilibres familiaux rompus, enfants laissés sur le carreau…) ne s’est pas vérifiée – ou alors pas durablement –, beaucoup de parents et enseignants conservent le sentiment d’une réforme obtenue à marche forcée. Une réforme qui n’est pas tout à fait la même partout sur le territoire, et qui reste à stabiliser : les changements dans les activités proposées d’une année sur l’autre (quand ce n’est pas d’un jour sur l’autre), les hausses de facture constatées, ici ou là, en dépit de l’aide aux communes apportée par l’Etat (désormais « pérennisée ») n’aide pas à y voir clair. Mais c’est surtout l’intérêt pédagogique des organisations proposées qui laisse plus d’un observateur de l’école songeur.
Nos 6,8 millions d’écoliers y gagnent-ils vraiment avec cette demi-journée d’école en plus mais avec un agenda à peine (voire pas) allégé ? La promesse d’un retour à la semaine de quatre jours et demi est-elle vraiment tenue quand, comme ont choisi de le faire des centaines de villes – dont Marseille –, c’est le vendredi après-midi qui est consacré aux ateliers périscolaires ? Quel impact avéré sur les rythmes biologiques des enfants ? Quels bénéfices sur leurs apprentissages ?
Il suffit d’allumer le micro pour que même le parent d’élève le plus favorable à la réforme défendue, il y a deux ans par l’ancien ministre Vincent Peillon, émette des réserves. D’autant que la promesse d’une réorganisation plus globale du temps scolaire – à l’école mais aussi en collège et lycée – est, elle, restée lettre morte… ou presque. La seule évolution visible en 2015-2016 porte sur l’anticipation des vacances de printemps. Au bénéfice des lobbys du tourisme plus que de l’enfant.
En guise de réponse, ce sont deux protocoles d’évaluation que le ministère de l’éducation a promis : une étude sur 15 000 élèves entrés au CP en 2011, « intégrant des évaluations cognitives en français et en mathématiques en fin de CM2 » et une autre portant sur un échantillon de 5 000 élèves de cinq villes répartis sur des modes d’organisation « représentatifs », pour comparer l’impact de ces derniers. Une troisième recherche doit cibler une académie, en s’attaquant à la question de la fatigue des écoliers. Les écoles et les classes sur lesquelles ces enquêtes porteront doivent être sélectionnées ce mois-ci, on ne connaît pas plus en détail l’échéancier.
Une kyrielle de chiffres. En attendant, la mise en place des nouveaux rythmes se résume à quelques chiffres. Vingt mille villes ont un recul d’un an sur la réforme, quand 4 000, qui avaient sauté le pas dès la rentrée 2013, en ont deux. Si 86 % appliquent le décret Peillon (9 demi-journées de 3 h 30 au maximum par semaine), 14 % bénéficient de l’assouplissement consenti par le « décret Hamon » qui leur a permis, notamment, de concentrer l’ensemble des activités périscolaires sur un seul après-midi. Lyon et une quinzaine de grandes villes avaient fait ce choix en 2014, mais la très grande majorité des communes concernées sont de petite taille, en milieu rural.
Une norme ? Selon un bilan d’étape communiqué par la Rue de Grenelle, le 25 juin 2015, la semaine de quatre jours et demi est bien redevenue la norme, avec, majoritairement, un retour à l’école le mercredi matin. Vincent Peillon avait donné aux villes la possibilité, sur dérogation, de rétablir le samedi matin travaillé (comme avant la réforme Darcos de 2008), mais cela concerne de moins en moins d’écoliers : 2,3 % en septembre 2015, contre 5,5 % l’an dernier. D’une rentrée sur l’autre, seulement 6 % des villes ont revu leur emploi du temps – dont Marseille. En revanche, la très grande majorité (plus de 8 communes sur 10) a fait le choix d’un projet éducatif territorial (PEDT) qui pousse enseignants, élus et associations à travailler de concert.
Source: lemonde.fr
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