Ce court descriptif résume assez bien la réforme du collège que porte Najat Vallaud-Belkacem. Mais pourrait tout aussi bien évoquer la réforme du primaire de 2008 ou les lois Fillon sur l’école de 2005.
La France aime se déchirer à propos des méthodes éducatives, et le fait régulièrement, à chaque réforme ou presque. C’est le cas de toutes les réformes d’ampleur de ces dix dernières années.
A chacune de ces réformes, ou presque, on retrouve les mêmes éléments de débat. Et notamment une opposition structurelle en France, depuis 30 ans, entre deux écoles de pensée :
Les « modernes » : le « pédagogisme » (selon ses détracteurs), « constructivisme » ou « progressisme », méthode qui vise à pousser l’élève à construire son apprentissage et à « apprendre » de manière plus autonome. L’enseignant a alors pour rôle, davantage que de transmettre, d’accompagner l’élève dans son apprentissage. Cette méthode est généralement plutôt prônée à gauche, et s’accompagne souvent d’un discours égalitariste : tous les élèves doivent avoir accès aux mêmes enseignements.
Les « anciens » : les « anti-pédagogistes », qu’on pourrait aussi baptiser « élitistes », qui estiment, à l’inverse, que le rôle de l’enseignant est avant tout de transmettre un savoir, et le rôle de l’élève de l’apprendre. Ils souhaitent revenir à des méthodes qui étaient celles d’avant 1968. On retrouve ce courant plutôt à droite (Luc Ferry, par exemple, ou Xavier Darcos), et ce combat est généralement accompagné d’un discours élitiste : il faut des classes et des options pour que les meilleurs élèves puissent aller le plus loin possible.
Cette opposition se retrouve dans chaque réforme de la dernière décennie.
En supprimant les classes bilangues, jugées élitistes, en contrepartie d’un renforcement des langues étrangères pour tous les collégiens, Najat Vallaud-Belkacem est ainsi accusée de promouvoir un « nivellement par le bas » ou de faire de « l’égalitarisme ».
A l’inverse, en 2009-2010, Luc Chatel était accusé, en promouvant une autonomie accrue des lycées, qui pouvaient mettre en place un accompagnement personnalisé des élèves, de donner dans l’élitisme et de créer un « lycée français à deux vitesses », comme l’en accusait dans une tribune dans le Monde Eric Barbazo, président de l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (l’APMEP).
Autre vieille bataille, celle de l’enseignement de l’histoire. Là aussi, le clivage est net et très politique entre partisans d’un enseignement transversal, qui ne se centre plus sur la chronologie historique mais balaie des époques autour de thèmes (la démocratie, la mondialisation, etc.) d’un côté, et de tenants d’un retour à l’enseignement plus traditionnel, plus chronologique de l’histoire – ou du « roman national », comme la matière est surnommée dans le débat actuel – de l’autre.
On peut trouver également chez ces « traditionalistes » la dénonciation de la « repentance » et de la place trop importante accordée, selon eux, à l’évocation de pans moins glorieux de notre histoire comme la traite négrière.
En 2008, Xavier Darcos, qui avait envisagé que les députés puissent définir en partie le contenu de l’enseignement de l’histoire, avait dû reculer face à la bronca aussitôt déclenchée par les enseignants.
En 2015, la question de l’autonomie accrue des collèges, qui pourront définir le contenu de 20 % des enseignements, fait partie des éléments critiqués de la réforme. Ce n’est pas la première fois.
Lors de la réforme des lycées en 2008, l’autonomie accrue de ces établissements du secondaire avait déjà fait polémique, des syndicats d’enseignants estimant qu’il s’agissait là d’une manière de masquer des suppressions de postes et de moyens. La même question a été posée quant à l’autonomie des universités lors de leur réforme durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Source: lemonde.fr
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